BONS BAISERS DE TUNIS
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Patisserie Ben Yedder
Fin 2019, j’ai découvert Tunis.
place de l’Indépendance
 Ville-musée dont l’essentiel du patrimoine architectural fait l’objet d’un classement à l’Unesco;Â
Ville dont chaque recoin, de la medina à la ville nouvelle en passant par sa banlieue nord, témoigne du brassage culturel s’y étant, au fil des siècles, opéré;
Ville devenue l’épicentre du mouvement de contestations que constitua le Printemps Arabe;
Ville aujourd’hui en pleine mutation.
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Arpentée, durant l’arrière saison, voici donc mes clés pour mieux saisir l’âme de la charmante capitale du Pays des Jasmins.
DÉCOUVRIR LES MILLE ET UNS VISAGES DE LA PLURISÉCULAIRE MÉDINA
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Il faut franchir ses imposantes portes, vestiges des remparts qui autrefois la ceignaient, pour découvrir la médina de Tunis, inscrite, depuis 1979, au Patrimoine de l’Unesco.
Où, depuis le 7 ème siècle, bat incontestablement le pouls de la ville.
Un constat dont on prend immédiatement la mesure en s’enfonçant dans cet aussi photogénique qu’animé territoire, lacis de tortueuses ruelles, éveillant les sens à plus d’un titre.
Aux appels des muezzins, aux pas pressés des portefaix et à ceux de la foule tentant de se faufiler à travers les ruelles répond ainsi l’effervescence des nombreux souks couverts, répartis par corps de métiers, gardiens d’immémoriaux savoir-faire.
Autant d’inoubliables escales pour qui souhaite acquérir magnifiques parfums, bijoux, étoffes, babouches, chéchias,
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maroquineries, cuivres, livres, tapis et vanneries.
Outre plantes médicinales, odorantes épices, exquis encas salés et douceurs notamment achetées sur l’étal de la pâtisserie Gmati.
Pourtant, aussi envoûtante que puisse être cette expérience, elle ne saurait vous conduire à occulter les autres attraits de la vieille ville.
Dont le charme suranné certes se dégage d’un exceptionnel patrimoine architectural (lequel sera plus bas abordé) et de jolies adresses gastronomiques mais qui, in fine, se révèle encore davantage loin des sentiers convenus.
Là où d’anciens palais abandonnés sont en cours de restauration;
Là où se sont implantés de renommées écoles ( telle La Rachidia, dédiée à la musique) et de plus intimistes lieux de culture ( à l’instar de la Maison de la Poésie);
Là où des chemins secrets mènent à de confidentiels cours, patios et passages voûtés;
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Là où de paisibles places se sont muées en terrain d’expression pour de jeunes footballeurs ;
Là où derrière d’imposantes portes se cachent de bien belles demeures, converties ou non en maison d’hôtes,
Là où de petites épiceries font vivre des micro quartiers;
Là où les habitants se retrouvent devant la porte d’insoupçonnés hammams;
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Là où les chats se prélassent au soleil sans craindre d’être dérangés;
Là où les fleurs viennent raviver de leur éclat des rues aux façades blanches et aux volets bleus;
Là où il conviendra toujours, finalement, de se perdre encore et encore.
Difficile, après de telles flâneries, de ne pas succomber au cachet de la médina de Tunis, n’est ce pas ?
ADMIRER LE RICHE PATRIMOINE ARCHITECTURAL TUNISOIS
mosquée Hamouda Pacha
Qu’il soit profane ou relève du sacré, embellisse le cÅ“ur de la médina ou soit un repère de la ville nouvelle, le patrimoine architectural tunisois est indiscutablement de toute beauté.
Ainsi, dans le cœur historique, les façades blanchies à la chaux, les volets de couleur et les portes richement ouvragées donnent déjà le ton.
Comment ne pas, ensuite, se laisser envoûter par la beauté des places ,
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vue sur la place du Gouvernement depuis le rooftop de l’hôtel Dar El Jeld
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place de la Victoire et Bab El Bhar en arrière-plan
place de l’Indépendance, sculpture représentant Ibn Khaldoun (philosophe, sociologue et historien tunisois du 14 ème siècle)
des portes d’accès,Â
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Bab El Khadra
des Médersas,Â
médersa Slimanya
des Zaouias ,
zaouia Sidi Ben Arrous
zaouia Sidi Mehrez
des Dars transformés en musées (malheureusement souvent fermés , comme les Dars Bach Hamba et Abdallah , ou non ouverts à la visite à l’instar du Dar Othman )
Dar Othman
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et en bibliothèque nationale,
des Tourbet ( mausolée),
Tourbet El Bey, abritant les tombes de la famille du bey
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des Fondouks (caravansérails), dorénavant investis, pour certains, par des restaurants ou cafés .
restaurant et boutiques , fondouk El Attarine
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Et par celle, enfin, des mosquées.
L’iconique Zitouna, la plus ancienne de la ville, érigée au 9 ème siècle, bien évidemment.
Dont le minaret, les colonnes et la cour intérieure se laissent contempler, au cas ou vous auriez manqué la courte fenêtre quotidienne durant laquelle son esplanade est accessible aux non-musulmans, depuis la terrasse du Café Panorama.
Sans oublier les mosquées Hamouda Pacha, Sidi Youssef, de la Kasbah et Mohamed Bey.
mosquée Hamouda Pacha
mosquée Mohamed Bey
mosquée de la KasbahÂ
mosquée Sidi Youssef
S’articulant autour de l’emblématique avenue Bourguiba et de ses adjacentes artères (Avenue de Paris, Avenue Habib Thameur et Avenue Taieb Mhiri pour ne citer que celles là ), la ville coloniale dessinée au 19 ème siècle, sous le Protectorat français, offre quant à elle un tout autre visage.
Horloge de l’Avenue Bourguiba
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une rue non loin du Marché Central
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Marqué par de larges avenues plantées de palmiers sur lesquelles donnent mille petites rues perpendiculaires, boutiques, terrasses de café;
Et se dressent des édifices de style Haussmanien, Art Déco, Art NouveauÂ
façade du théâtre municipal
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voire même en combinant parfois plusieurs autres.
A l’instar de l’imposante Cathédrale Saint Vincent de Paul illustrant le mariage entre style byzantin et style roman.
cathédrale Saint Vincent de Paul
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C’est aussi dans la ville nouvelle que débute la ligne ferroviaire Tunis-Goulette-Marsa (TGM) reliant Tunis à sa banlieue nord;
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Que les familles choisissent d’effectuer leurs promenades dominicales et que le parc du Belvédère, abritant notamment une Koubba et un zoo, fait figure de véritable oasis urbaine .
parc du Belvédère
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Koubba du parc du Belvédère
EXPLORER TUNIS SOUS LE PRISME DE L’ART
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oeuvre de street art au cœur de la médina
Contrairement à ce que l’on pourrait de prime abord penser, Tunis, laquelle a d’ailleurs donné son nom à une renommée école picturale née aux lendemains de la seconde guerre mondiale, est une ville d’Art.
La présence d’Å“uvres de street art, à découvrir notamment sur les murs de la médina,
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dans le quartier Lafayette
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ou encore sous le pont, devenu un incontournable spot à ce titre, de la République, en atteste.
Depuis la révolution de Jasmin, le bouillonnement artistique se mesure, par ailleurs, à l’aune des nouveaux espaces culturels, boutiques d’art et galeries ayant ouvert leurs portes.
Tels le Coin de l’Artiste
oeuvre exposée au Coin de l’Artiste
ou encore Central Tunis qui, place de Barcelone, expose de jeunes artistes tunisiens contemporains dont les Å“uvres invitent à la réflexion.Â
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Qui dit Art pense, inévitablement, aussi aux musées.
Et, en l’occurrence, à Tunis à l’incontournable musée du Bardo
ayant pris ses quartiers dans une résidence, datant du 19 eme siècle, jadis occupée par le bey de la ville.
plafond , salle de Thugga
Une enclave qui non seulement abrite la plus riche collection mondiale de mosaïques, fussent elles byzantines ou romaines, provenant de l’ensemble des sites archéologiques tunisiens
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mosaïque exposée dans la salle d’Ulysse
alcôve de Virgile, Portrait du poète Virgil, entouré des muses de la Littérature
mais qui peut, en outre, se targuer de notamment posséder plusieurs chef-d’œuvres, punique, romain, numide, juif et islamique, racontant l’histoire de la Tunisie.
Mercure
baptistère de Demna
Amphorisques
Beaucoup moins connu que le Bardo, le musée de la Ville de Tunis, installé dans le séculaire palais Kheireddine, mérite aussi l’escale pour la beauté des expositions temporaires qui y sont présentées.
Awatef Ridene
Maha Kechaou
Mohamed Ghassan
SE RÉGALER LES PAPILLES
Dar El Jeld
Colorée, parfumée, épicée et métissée ( grâce aux influences des gastronomies arabe, berbère, juive, turque, italienne, espagnole et française), la cuisine tunisienne en général et tunisoise en particulier, faisant tant la part belle aux produits de la mer, aux laitages, aux fruits & légumes qu’aux viandes, saura vous régaler.
Mais si vous en doutiez encore, arpenter le souk aux épices de la médina puis le pittoresque marché central El-Ghalla, niché dans la ville « moderne », suffira à vaincre toutes vos résistances.
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Ode aux couleurs, aux senteurs et aux saveurs locales, l’endroit
Marché Central
se distingue autant par la qualité des produits alimentaires (mais pas uniquement) qui y sont proposés
que par la personnalité des vendeurs, devenus experts dans l’art d’accoster les clients et de sublimer leurs étals.
section dédiée aux fleurs , Marché Central
Après un tel prometteur avant-goût, place à la dégustation.
Comme partout ailleurs dans le Maghreb, les stands de street food sont, à Tunis, particulièrement nombreux , permettant donc, à n’importe quel moment de la journée, le contentement de petites faims.
Les fricassés, savoureux mini sandwichs fourrés au thon, à la pomme de terre et à la harissa, ainsi que les bricks à l’œuf, au thon ou à la viande restent à ce titre mes must eat.
Plutôt bec sucré ?
Makroud, Yoyos, Zlabia et autres délicieuses (mais caloriques) pâtisseries imprégnées de miel ou de sirop de sucre réjouiront, j’en suis certaine, vos papilles .
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Pour boire, en revanche, une exquise citronnade maison, un thé à la menthe et aux pignons,
thé à la menthe & pignons, Café des Panoramas
un café et de la boukha (alcool de figue), tout en fumant le narguilé, marquez une halte dans l’un des innombrables cafés que compte la médina.
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café découvert au cœur de la médina
Par exemple, rue Dribat;
dans une galerie se trouvant près du souk des chéchias;Â
à l’emblématique, car le plus ancien de la ville, Café M’Rabet que l’on reconnait à ses colonnes, banquettes et nattes,
ou encore à l’inoubliable Café Panorama.
Époustouflant rooftop, aux multiples alcôves de mosaïques bleues, depuis lequel la mosquée Zitouna, au premier plan, et la ville de Tunis, plus largement, se laissent, avec bonheur, embrasser du regard.
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Envie de succulents gâteaux et d’une tasse de café, dont les grains ont au préalable été torréfiés sur place ?
Mettez, sans hésitation, le cap sur l’un des établissements tunisois de la maison Ben Yedder.
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Satisfaction gustative assurée !
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Puis, quand vient l’heure de déjeuner, le restaurant niché au cÅ“ur du magnifique Fondouk Attarine offre une très belle entrée en matière dans la gastronomie tunisienne.
En proposant notamment à la carte salade mechouia, brick, ojjia et couscous gourmands.
 Mais, ici, l’ode à la culture nationale ne se limite pas qu’à l’assiette.
Elle se matérialise, en effet, également dans les boutiques, aménagées au rez-de-chaussée et à l’étage, où créations contemporaines locales côtoient produits d’artisans , tous choisis avec soin.
A quelques mètres de là , Dar Belhadj est une autre adresse gastronomique de choix.
A la majesté de son cadre, une maison aux murs recouverts de zellige où l’on dîne dans le patio, les salles attenantes ou les alcôves situées à l’étage, viennent s’ajouter une savoureuse cuisine maison, mettant à l’honneur les terroirs culinaires locaux, et de magiques concerts de musique traditionnelle.
De quoi rendre inoubliable toute soirée passée en ses murs.
Néanmoins, à bien y réfléchir, si je ne devais vous recommander qu’une seule table tunisoise, où se rendre dans la médina, ce serait définitivement Dar El Jeld.
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Une adresse exceptionnelle par son cadre :
Maison élégante, dotée de spectaculaires plafonds sculptés et de murs ornés de mosaïques, dont on investit le patio couvert et les nombreux cocons aménagés au rez-de-chaussée et à l’étage.
Une adresse exceptionnelle par sa cuisine, uniquement préparée, comme chez Al Fassia à Marrakech, par des femmes.
Qui, de la plus belle manière, y subliment la gastronomie tunisienne.
J’ai, pour ma part, eu un énorme coup de cÅ“ur pour les bricks, le mosli d’agneau et les pâtisseries.
Enchanteresse parenthèse for sure.
 Enfin, bien loin du cœur de Tunis, le cadre presque bucolique,
vue sur le lac, quartier des Berges du Lac
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la terrasse panoramique s’ouvrant sur le lac de Tunis
et la carte conjuguant avec brio mets tunisiens et spécialités méditerranéennes suffisent, amplement, à faire du restaurant de l’hôtel Concorde Les Berges du Lac une autre très belle escale gustative.
Dont je me souviens, cinq mois plus tard, avec beaucoup d’émotion.Â
FRANCHIR LE SEUIL, VOIRE PLUS SI AFFINITÉS, DE SES HÉBERGEMENTS D’EXCEPTION
piscine extérieure , Four Seasons Tunis
Révolu est le temps où l’hôtellerie tunisienne n’était incarnée que par de vastes resorts dénués de charme.
Partout dans le pays, boutique hôtels, établissements confidentiels possédant une âme, hôtels de luxe à l’identité marquée et anciens palais désormais métamorphosés en maisons d’hôtes ouvrent, en effet, aujourd’hui leurs portes.
Et Tunis ne déroge pas à la règle .
Rue du Trésor, à proximité du Souk El Blat, la maison Dar Zyne en est une vibrante illustration .
Jadis demeure bourgeoise, l’endroit accueille depuis peu une intimiste maison d’hôtes où l’on se sent comme chez soi.
Testée durant mon séjour, je vous invite à la découvrir plus en détail en cliquant ici.
Autre lieu, autre adresse, autre esprit avec le récent Four Seasons Tunis.
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Se dévoilant le long d’une plage de la huppée station balnéaire de Gammarth, située à quelques encablures de Tunis.
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Incontestablement luxueux, l’établissement séduit par ses confortables chambres, ses piscines, son spa,
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son accès privilégié à la mer,
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le service aux petits soins prodigué, la quiétude enveloppant les lieux et son offre de restauration variée combinant restaurant gastronomique, table bistronomique, brunch dominical et délicieux encas .
Dont je me suis d’ailleurs régalée, confortablement installée dans le lounge jouxtant le lobby de l’hôtel, quelques heures avant mon retour à Paris.
S’ÉVADER DANS LES PROCHES ENVIRONS DE TUNISÂ
colline de Byrsa, site archéologique de Carthage
Même si la perspective d’un road trip à travers le pays me réjouissait, j’ai finalement choisi de placer ma première échappée tunisienne sous le signe du slow travel.Â
Limitant mes explorations, en ces fêtes de fin d’année, à la ville de Tunis, stricto sensu, puis à ses environs.
Un itinéraire, pour le moins classique, qui m’a menée :Â
A Sidi Bou Said tout d’abord.
Première halte de mon périple, ce village, où je me suis durant quelques jours installée, fait partie de ceux qui vous laissent un impérissable souvenir.
Je n’avais donc pas d’autres choix que de lui consacrer plusieurs billets ( à retrouver ici et là ) sur le blog.
Alors si vous ne les avez pas encore lu, vous savez ce qu’il vous reste à faire 🙂
A la Goulette ensuite.Â
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Bâtie au bord du golfe de Tunis, à une dizaine de kilomètres de la capitale, la Goulette est bien plus que le premier port marchand tunisien.
Y déambuler revient en effet à remonter le temps et à découvrir, au détour de ses ruelles étroites, de ses façades décrépies, de ses bâtiments abandonnés et de ses différents édifices religieux, l’histoire d’un quartier populaire où les mixités culturelle et religieuse existaient autrefois.
Mais La Goulette est également prisée des amateurs de poissons et autres produits de la mer qui viennent s’y régaler de produits frais et parfaitement cuisinés servis dans les restaurants ayant, pour beaucoup, pris leurs quartiers avenue Roosevelt.
Cantines populaires, institutions reconnues ou établissements chics ayant opté pour une approche gastronomique plus contemporaine, chacun de ces lieux vous assurent, quoiqu’il arrive, un très joli voyage des papilles.
Ainsi, le carpaccio de mérou, les pâtes aux fruits de mer, les brochettes de poisson outre la copieuse kemia dégustés à La Spigola,
véritable table d’habitués, m’ont laissée un fabuleux souvenir.
A Carthage enfin.
Classées à l’Unesco, les ruines de la mythique cité de Carthage permettent de toucher du doigt l’histoire de cette puissante cité commerciale qui après avoir été punique devint romaine.
Fondée au 9 eme siècle avant JC par la princesse phénicienne Didon, Carthage fut, en effet et au terme de plusieurs guerres puniques, détruite, en – 146, par Rome qui redoutait son hégémonie.
Des nombreux sites que compte la zone archéologique, j’ai choisi de visiter, parmi ceux alors ouverts (le musée archéologique ne l’était malheureusement pas) :
La colline de Byrsa, bénéficiant d’un exceptionnel point de vue sur le golfe de Tunis, où statues , vestiges de quartiers puniques et mosaïques se succèdent;Â
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statue de Saint Louis
tombe punique
vestiges puniques du quartier Hannibal
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La Cathédrale Saint Louis;
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Construite, dans un style architectural conjuguant influences arabo-chrétiennes, sur des ruines puniques et romaines, elle rend hommage au roi français Saint Louis qui mourut à Tunis au 13 eme siècle
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 et les époustouflants Thermes d’Antonin .
Sans oublier d’aller m’émerveiller devant les sols en mosaïques de certaines villas romaines.Â
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Qui a dit que Tunis ne méritait pas que l’on s’y attarde plusieurs jours ?