BUNDI, L’AUTRE, MÉCONNUE, VILLE BLEUE DU RAJASTHAN
vue sur Bundi depuis le Garh Palace ( palais royal de Bundi)
Il suffit de parcourir cette incontestable terre des rois qu’est l’Etat du Rajasthan pour, immédiatement, prendre la mesure de la prégnance qu’y revêtent les couleurs.
Dont l’omniprésence, non contente de notamment se dévoiler au cœur des marchés, à travers les fresques murales peintes partout où le regard se pose, dans les paysages pluriels traversés, par le biais de ses recherchées pierres précieuses , au détour des étroites ruelles quotidiennement empruntées par une foule compacte, sur les camions filant à vive allure sur ses routes, au cœur des temples et via les chatoyantes étoffes composant les saaris élégamment portés par les femmes, va même jusqu’à transparaitre dans les périphrases désignant ses cités les plus connues :
Jaisalmer devenant ainsi, grâce aux teintes révélées par son architecture, la « Ville Dorée »; Jaipur la « Ville Rose »; Udaipur la « Ville Blanche » et Jodhpur la « Ville Bleue ».
Ville Bleue.
Un surnom qu’une deuxième cité, bien moins connue que la première, lui dispute pourtant : la multiséculaire Bundi.
panoramas de Bundi depuis le palais royal et le lac Nawal Sagar
Qui, entre Udaipur et Jaipur, dévoile, depuis le 14 eme siècle, un tout autre visage du Rajasthan.
Rimant avec charme désuet, infinie quiétude, ruralité, vivaces traditions artistiques et plus grande authenticité.
De ma brève escale là-bas, à l’été 2018, je garde tout d’abord en mémoire la beauté du Raniji Ki Baori, incontournable chef-d’œuvre situé en plein de cœur de la ville.
Ce magnifique puits à degrés, édifié à la fin du 17 ème siècle par une reine, se distinguant aussi bien par ses exceptionnelles taille et profondeur outre le nombre élevé de ses marches que par les arches, inscriptions et sculptures, réalisées avec finesse, de dieux et déesses l’ornant.
Je me souviens ensuite de ces quelques heures passées, juste avant le coucher de soleil, à flâner dans les étroites ruelles de la vieille ville.
Là où bat, irrémédiablement, le pouls de la cité.
Là où son âme se laisse toucher du doigt.
Et même si les bazars, à l’heure où mes pas arpentèrent Bundi, y avaient déjà fermé leurs portes, l’activité se poursuivait néanmoins dans la rue et les habitants continuaient à vaquer à leurs occupations.
Aussi plurielles soient elles.
Qui attendant le client ;
Qui vendant mille et uns délicieux encas;
Qui arpentant la ville en vélo;
Qui prenant l’air sur le seuil de sa maison;
ou qui tentant désespérant d’en sortir alors qu’une vache, mammifère sacré dans la culture indienne s’il en est, en bloquait désespérément l’entrée.
L’absence de circulation majeure, comparativement aux autres villes-clé du Rajasthan, ayant, définitivement conduit plusieurs espèces d’animaux, à l’instar des vaches, cochons et singes, à convertir l’espace public en leur terrain de jeu favori.
Mais au-delà desdites rencontres, déambuler à Bundi fut aussi pour moi l’occasion de:
Régulièrement m’arrêter pour admirer les superbes peintures, figurant guerriers rajputs, animaux, parties de chasse et dieux, habillant les façades;
Pénétrer dans de magnifiques havelis, ces anciennes demeures de riches marchands (dont certaines ont désormais été investies par des hébergements de charme), reconnaissables à leur traditionnelle architecture rajpute et à leurs fresques murales, qui sont ici légion;
Boire un chai, grignoter un dosa ou déguster un samoussa chaud;
et, in fine, reconnaitre que Bundi n’a en rien usurpé, ainsi qu’en témoignent ses édifices peints de différentes nuances d’Azur, son statut de Ville Bleue.
Une couleur évoquant les Brahmanes et supposée, plus prosaïquement et aussi surprenant que cela puisse paraître, contribuer à l’éloignement des moustiques.
Mais à cette ville qui aurait inspiré à Rudyard Kipling son célèbre Livre de la Jungle, j’associe également l’impérissable souvenir d’une nuit passée au sein de l’irrésistible Haveli Braj Bhushanjee.
Une demeure familiale, vieille de plusieurs siècles, aujourd’hui transformée en une bien belle maison d’hôtes comptant une vingtaine de chambres.
Entre le somptueux décor des lieux, véritable ode à la culture indienne, en général, locale, en particulier, et à l’histoire des propriétaires;
L’intimiste patio; les panoramas offerts sur les toits de la ville ainsi que sur le palais royal se trouvant à seulement quelques centaines de mètres; la sérénité enveloppant l’endroit et l’aussi savoureuse que copieuse cuisine végétarienne servie sur place : cette adresse ne pourra que vous séduire.
Enfin, ne quittez pas Bundi sans vous rendre aux historiques Garh Palace (résidence, à compter du 16 ème siècle, des rois locaux) et fort adjacent, relié par un chemin escarpé, de Taragarh, qui, accrochés à flanc de colline, dominent la cité de leurs imposantes silhouettes entourées de remparts.
S’ils sont aujourd’hui laissés à l’abandon (une restauration a néanmoins débuté au palais royal en mars 2020), que la nature y a sans conteste repris ses droits et qu’une colonie d’écureuils et de singes (pour le moins agressifs) s’y est durablement installée, ces joyaux touristiques méritent néanmoins l’escale à triple titre :
Pour les extraordinaires perspectives, sur la ville bleue, s’étendant en contrebas, et ses reflets miroitant dans les eaux du lac artificiel de Nawal Sagar ( où d’ailleurs émerge un temple) dont jouissent leurs terrasses et jardins;
Pour leur incroyable architecture rajpute, œuvre des différents souverains qui gouvernèrent Bundi, conjuguant sculptures finement ciselées, pierre et marbre, jardin en terrasse, grandes cours, escaliers, zenana (bâtiment réservé à l’usage exclusif des femmes), mardana (espace réservé aux hommes), arches, motifs en forme d’éléphants ou de lotus, tours octogonales, chhatris et jharokhas avec brio ,
rampe d’accès au Palais & Hathipol (monumentale porte d’entrée figurant deux éléphants)
vues sur le Ratan Daulat
trône en marbre sur lequel siégeait le souverain
Et pour les fabuleuses fresques, partiellement estompées ou étonnamment préservées pour certaines, dont les murs du Garh Palace sont recouvertes.
Représentant, dans une palette chromatique faisant la part belle au jaune, vert, rouge et turquoise, scènes de la vie quotidienne, portraits féminins, partie de chasse, batailles, dieux et rencontres amoureuses, elles sont une vibrante illustration des renommées, peintures, miniatures de l’École de Bundi.
Chitrashala
Loin des villes rajasthanies les plus connues,
De leur tumulte perpétuel,
De leurs embouteillages impliquant indifféremment voitures, camions et rickshaw,
De la pollution sonore engendrée par les continus concerts de klaxons, la musique diffusée à chaque coin de rue, les innombrables processions religieuses et les intempestives sollicitations des marchands, Bundi fait, à n’en point douter, figure de havre de paix où le Temps s’arrête.
Une escale aux airs résolument « Slow Travel » qui, à l’approche de la fin de mon long périple dans cet état des Maharadjah, m’a offert, comme ce fut le cas quelques jours auparavant à l’inoubliable Laksman Sagar, des moments de respiration dont j’avais alors, sans le savoir, véritablement besoin.
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Et vous, avez-vous déjà entendu parler de Bundi ?
Marie-Cécile Darmon | Déc 26, 2020 at 18 h 14 min
Personnellement, je n’en avais jamais entendu parler… 😉
Merci pour la découverte, les couleurs sont splendides !
Le Pigeon Voyageur | Déc 26, 2020 at 18 h 23 min
Effectivement Jodhpur ( l’autre ville bleue du Rajasthan) lui vole toujours la vedette 😄.
Mais le charme désuet de Bundi, ses vestiges pluriels du passé, son authenticité méritent à mon sens tout de même l’escale
Célinie | Déc 29, 2020 at 5 h 36 min
Jamais entendu parler bien à tort assurément merci 🙏🏾 pour cette magnifique découverte et ces photos incroyables dont le tri n’a pas dû être des plus aisés tant les sujets et lieux rivalisent de beautés et de richesses colorées.
Le Pigeon Voyageur | Déc 29, 2020 at 13 h 32 min
Merci Celinie pour tes mots et ravie d’avoir pu te faire découvrir ce petit coin paisible du Rajasthan .
Et effectivement la sélection photo fut loin , comme toujours, d’être aisée 😂😂😂 mais j’ai essayé de choisir les clichés qui me
parlaient le plus 😉