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SUR LES TRACES DE FELA KUTI A LAGOS

  |   AFRIQUE, ART & CULTURE, EUROPE, FRANCE, Lagos, MUSEE, NIGERIA, Paris   |   2 Comments

 Fela et certaines de ses danseuses, photographie, Kalakuta Museum, Lagos, Nigéria

 

 

Il y a quelques semaines, près de 17 ans après mon dernier passage dans la capitale économique nigériane, j’ai de nouveau fait escale à Lagos.

 

Une escapade, décidée à la toute dernière minute, dont la brièveté ne m’a nullement empêchée de partir en quête de l’héritage  laissé par feu Féla Anikulapo Kuti (1938-1997), artiste hors-pair, avant-gardiste, engagé et véritable héraut de la culture africaine, dans les rues de la première ville du pays.

 

Là où, 19 ans plus tôt,  j’avais appris, alors que je me trouvais, en cette fin d’après midi du 2 août 1997,   au milieu de ses légendaires go slows, le décès de cette légende musicale.  

 

Trop jeune à l’époque pour pouvoir prendre toute la mesure de cette incommensurable perte, il me tardait donc de pouvoir placer mon retour au Nigéria sous le signe de la redécouverte de ce legs célébré, depuis près de deux décennies, à travers le monde.

 

Ainsi, marcher sur les traces de celui que l’on surnommait également « The Black President » m’a  tout d’abord menée  rue Gbemisola, dans la banlieue lagotienne d’Ikeja, où se trouve la dernière demeure qu’il habita.

 

Après avoir fait l’objet de quelques aménagements, cette dernière a été transformée en un musée,  inauguré  le 15 octobre 2012, (date doublement symbolique car rappelant celle de sa naissance et marquant, par ailleurs, le début des Felabrations, séries de commémorations annuelles qui lui rendent hommage, pendant une semaine au mois d’octobre, au New Afrika Shrine )  :  le Kalakuta Republik Museum.

 

 

 

 

 

Un nom qui n’est pas sans rappeler celui du premier studio d’enregistrement-habitation (propriété proclamée État indépendant  par Fela lui même) que la junte militaire nigériane d’alors n’hésita pas à incendier totalement, en 1977, en guise de représailles envers le musicien dénonciateur.

 

Ici, l’immersion dans l’univers du Père de l’Afrobeat (style musical combinant, notamment, jazz, soul funky inspirée du chanteur américain James Brown,  sonorités musicales traditionnelles nigérianes et rythmiques particulières ) débute dès le franchissement des grilles d’entrée du musée puisque sa tombe

 

tombe de Fela Kuti

 

 

, se trouvant dans la cour,

 

quelques fresques visibles dans la cour du Musée

 

 

y accueille le visiteur.

 

C’est ensuite à l’intérieur de cette bâtisse à 3 étages que la découverte de l’Histoire (que celle-ci renvoie à sa vie privée, sa musique, ses influences ou encore à l’origine de ses combats) de Fela Kuti se poursuit.

 

quelques fresques et pochettes d’album dans le musée

 

 

   

 

 

Les multiples portraits accrochés aux murs constituent ainsi la première clef permettant de pénétrer dans son intimité familiale.

 

   

 

 

 

 

Des clichés figurant ses parents, l’on s’attarde plus particulièrement sur ceux  de sa mère, Olufunmilayo Kuti, dont il demeura très proche jusqu’à la mort ( survenue peu après la défenestration dont elle fut victime au moment de l’assaut militaire donné sur la Kalakuta Republic en 1977) de cette dernière.

 

 

 

 

Car il est incontestable que cette femme indépendante (première à conduire une voiture au Nigéria) et activement engagée dans la lutte pour l’indépendance de son pays, eut une grande influence sur la personnalité de son fils.

 

La galerie photographique exposée dans le musée témoigne ensuite de l’amour immodéré, objet de bien des controverses, de Fela pour la gent féminine.

 

Si l’on y retrouve, en effet, la mère (qui fut sa compagne officielle) de Seun et Yéni Kuti,

 

 

 

 

et ses concubines d’un temps (à l’instar de l’américaine Sandra Smith, laquelle fut également son mentor)

 

 

 

 

 certaines de ses  27  danseuses qu’il décida d’épouser, en 1978, lors d’une cérémonie collective y figurent également.

 

 

  

    

 

 

Et parce qu’une telle rétrospective ne serait pas complète sans évoquer sa descendance, vous ne serez pas surpris de voir quelques photographies de ses enfants.

 

A l’instar de sa fille aînée Yeni ou de ses fils Fémi (l’aîné)

 

 

 

et  Seun ( le cadet)

 

 

lesquels perpétuent, tous deux, désormais sa mémoire.

 

Illustrant sa vie professionnelle, les autres images présentées au Kalakuta Museum nous replongent, quant à elles, soit dans l’ambiance survoltée de ses concerts (donnés ou non à l’étranger ) avec l’orchestre  Africa 70 (plus tard renommé Egypt 80 ) soit dans les coulisses de ces derniers.

 

 

 

 

 

 

 

avec feu Thomas Sankara (ancien président du Burkina Faso)

 

 

Mais mieux appréhender la personnalité de Fela Kuti (objectif poursuivi par le musée) passe également par un regard jeté sur sa vie quotidienne.

 

En conséquence, aux détours de plusieurs pièces situées au premier étage, sont exposées quelques uns de ses instruments musicaux fétiches (tambours, guitares et  saxophones) ;

 

 

 

ses atypiques vêtements de scène  (costumes iconiques,  manteaux de fourrure, slips dans lesquels il accorda de nombreuses interviews)

 

 

 

 

 sa collection de paire de  chaussures

 

 

 

et, plus prosaïquement, des ustensiles de cuisine autrefois utilisés dans cette maisonnée en permanence ouverte à tous. 

 

 

 

 

La chambre de Fela, demeurée en l’état depuis son décès (en 1997) et uniquement visible à travers ses baies vitrées, constitue le point d’orgue de cette escale.

 

 

 

Enfin,  la dimension militante de Fela Kuti, influencé à ce titre tant par les luttes nationalistes de sa mère que  par sa déterminante rencontre avec le mouvement américain des Black Panthers, est loin d’être ici occultée.

 

Nul besoin de rappeler qu’il devint le porte parole des opprimés en dénonçant (ce qui lui valut plusieurs séjours en prison durant lesquels il fut sévèrement torturé) corruption des dirigeants de son pays,  dictature, absence de respect des droits de l’homme, difficultés auxquelles devaient faire face les nigérians ainsi qu’impérialisme occidental à travers plusieurs titres, depuis passés à la postérité, tels que  Zombie , Coffin for Head of State, Beast of no Nation ou Unknown Soldier.

 

L’on comprend mieux alors pourquoi certaines propositions du MOP (Movement of the people ), parti politique qu’il créa, à la fin des années 1970,  en vue de participer aux prochaines élections politiques nationales ( pour lesquelles sa candidature fut toutefois rejetée),  sont visibles dans l’une des salles du Kalakuta Museum.

 

 

 

 

 

 

 

Derniers conseils avant de quitter les lieux : ne manquez ni la terrasse, installée au dernier étage, où vous pourrez vous désaltérez tout en écoutant la musique du créateur de l’Afrobeat,

 

ni la boutique du rez-de-chaussée commercialisant souvenirs à l’effigie du musicien mais aussi coffrets , impossibles à trouver en ville, comprenant tous ses albums.

 

 

Mais quiconque désire marcher sur les traces de Fela Kuti à Lagos se doit, en second lieu, de passer une soirée au New Africa Shrine.

 

 

 

 

Emblématique club,  reconstruit en 2000 à Ikeja (car l’originel et mythique Shrine , sanctuaire, où, au début des années 70, Fela se produisait, rendait hommage à ses ancêtres et discutait de sujets politiques lors des Yabis Nights fut, concomitamment  à l’incendie de son domicile de la Kalakuta Republic, détruit par le pouvoir en 1977) par son fils Fémi (et géré avec Yéni la sÅ“ur de ce dernier) , où la mémoire et l’héritage musical du père se perpétuent toujours grâce, notamment, à des concerts ou aux Felebrations.

 

 

 

 

A moins qu’ils ne soient en tournée à l’étranger, Femi et Seun Kuti se produisent, tous les mardis et dimanches soirs, sur la scène, en partie ouverte, du New Afrika Shrine.

 

Les portraits des grands leaders noir américain (Luther King) et africains ( Mandela, Lumamba, Sankara, Nkrumah), sans oublier ceux de Fela et de sa mère confèrent à l’endroit un cachet tout particulier.

 

 

 

 

Que vous preniez place au pied de la scène,

 

 

 

dans l’espace VIP situé au 1er étage

 

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ou encore à proximité du food court (où vous pourrez commander de délicieux mets avec une mention spéciale pour le succulent mais extra pimenté poulet grillé que j’ai pu y savourer);  vous ne pourrez que vibrer au son des titres qui y sont joués.

 

Une ambiance que j’ai, pour ma part, pu découvrir dans la soirée du 2 août (jour anniversaire du décès de Fela Kuti).

 

Si j’y ai manqué de peu les frères Kuti, je ne regrette pas d’avoir franchi le seuil de cette enclave culturelle .

 

Où nigérians et touristes se donnent hebdomadairement rendez-vous pour communier, ensemble, sur une musique qui fait, ironie de l’Histoire, désormais la fierté du Nigéria tout entier.

 

A mes yeux, le New Africa Shrine ainsi que le Kalakuta Museum sont donc deux incontournables touristiques de la capitale nigériane.

 

Mais à défaut de pouvoir vous rendre dans les prochains jours à Lagos,  sachez que Paris vous réserve, cette semaine,  deux rendez-vous culturels de premier plan au cours desquels vous pourrez en apprendre tout autant sur Fela Kuti.

 

Le premier se tiendra, à 20 heures, demain soir, au MK2 Quai de Seine, dans le cadre du Festival Jazz à la Villette qui clôturera ses portes le 11 septembre.

 

Il s’agit de la projection de  Finding Fela, passionnant documentaire réalisé par Alex Gibney ( visible actuellement en replay sur le site d’Arte Tv à l’adresse : http://concert.arte.tv/fr/documentaire-fela-une-voix-pour-lafrique ou disponible en DVD), que j’ai eu l’occasion de visionner, en octobre 2015, à la Manufacture 111.

 

Un must see !

 

Cette escale cinématographique est d’autant plus exceptionnelle que Finding Fela sera présenté par Seun Kuti,  fils cadet de l’artiste dont je vous parlais un peu plus haut dans ce billet.

 

Puis, le 8 septembre à 20 heures, le concert-hommage de Seun Kuti & Egypt 80 qui se tiendra à la Grande Halle de la Villette  (et ce, toujours dans le cadre dudit festival) vous offrira l’inespérée occasion de vous déhancher sur les entraînantes sonorités afrobeat que Fela Kuti inventa .

 

Deux odes à un artiste de génie à ne pas rater 🙂

  

 

 

AUTEUR - Le Pigeon Voyageur

Et si le cœur vous en dit, vous pouvez également partager avec moi vos impressions, émotions et pourquoi pas interrogations après lecture de cet article et découverte de ces photos (toutes prises par mes soins). Alors à vos plumes !

2 Commentaires
  • JOËL ATAYI—GUEDEGBE | Sep 7, 2016 at 4 h 48 min

    Waoh! Il fallait y penser et s’en donner le temps. Quel beau ressourcement dans l’antre du Giant Anikulapo Ransome KUTI!
    Ce périple du Journal d’un pigeon voyageur dans la « République de Kalakuta » de « Black President » est au fond un pèlerinage à faire pour mieux s’imprégner _que par l’écoute de l’afrobeat_ de l’extraordinaire dimension de Fela.

    • Le Pigeon Voyageur | Sep 7, 2016 at 11 h 56 min

      Merci beaucoup Joel ! C’était exactement le but poursuivi : mieux saisir la personnalité de cette légende musicale

Répondre à JOËL ATAYI—GUEDEGBE Annuler réponse

 

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