SUMMER 2020, MES NOUVEAUX COUPS DE COEUR A OSLO
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Nils Olaf Nilsen,
fils de Peder Nilsen, guide frontalier Sami qui durant l’Occupation (1940-1945) de la Norvège par les Nazis aida plusieurs personnes, dont des prisonniers Norvégiens et Russes, à s’enfuir en Suède.
Château de la Rose
Oslo fut, cette année, le point de départ et la dernière escale de mes vacances estivales.
Envoûtée, à l’automne 2018, par le charme de la capitale norvégienne, je me réjouissais donc à l’idée de pouvoir à nouveau l’arpenter.
Et ce d’autant plus que le ciel bleu outre les températures plutôt chaudes annoncées, en venant reléguer au fond de ma mémoire le souvenir du froid mordant associé à notre première rencontre, signaient la promesse d’un séjour s’annonçant d’ores et déjà différent:
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Entre prendre la mesure du bouillonnement de sa scène gastronomique ; toucher du doigt une part de son Histoire au sein d’un majestueux édifice restauré; explorer des lieux que je ne connaissais pas encore et franchir, pour finir,  le seuil de plusieurs sites exceptionnels dont l’ouverture remontait à seulement quelques semaines. Â
Alors après avoir partagé avec vous mes adresses coup de cÅ“ur où s’y régaler mes adresses coup de cÅ“ur où s’y régaler et vous avoir immergé au cÅ“ur du magnifique Amerikanlinjen, je vous invite, à présent, à découvrir des sites, pour certains récemment édifiés, qui tout en inscrivant Oslo dans une ère résolument futuriste n’en oublient pas pour autant d’évoquer son passé. Â
LE DESIGN QUARTIER DE BISPEVIKA
vue sur le quartier Bispevika depuis la colline d’Ekeberg
Jouxtant le nouveau Musée consacré au peintre Edvard Munch, le tout récent quartier de Bispevika témoigne de la renaissance architecturale dont le front de mer d’Oslo, et plus particulièrement le district de Bjorvika, est, ces dernières années, devenu le théâtre.
Aux imprenables vues qu’il offre sur le fjord d’Oslo et aux conviviaux bars outre restaurants qui y ont ouvert leurs portes, Â s’ajoute le charme de ses immeubles, Ã l’architecture ultra contemporaine, que de bucoliques petits canaux relient entre eux.
Comme un air de Venise, en plein cœur de la capitale norvégienne, dont je ne me suis pas lassée.
L’INEDITE SORENGA SEAWATER POOL
Sorenga Pool vue depuis la colline d’Ekeberg
Non loin du quartier de Bispevika, celui de Sorenga, ancien port où des conteneurs étaient jadis entreposés, s’est aujourd’hui métamorphosé en une enclave résidentielle, complètement tournée vers la mer, dont l’un des plus iconiques symboles est la Sorenga Seawater Pool.
Incroyable piscine flottante d’eau de mer, jouissant d’exceptionnels perspectives sur le fjord d’Oslo et le centre ville, qui voit, été comme en hiver, toutes les générations s’y retrouver.
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Qui pour se baigner dans l’un ou l’autre des différents bassins aménagés autour d’elle,
Qui pour perfectionner ses plongeons,
Qui pour profiter de la plage attenante et qui pour, tout simplement, contempler la majesté de la nature environnante.
LA MAGNIFIQUE BIBLIOTHEQUE DEICHMAN BJORVIKA
Imaginée par le cabinet d’architectes Lund Hagem et l’Atelier Oslo, la bibliothéque Deichman Bjorvika , ouverte à la mi-juin 2020, fait, à plus d’un titre, déjà figure d’incontournable adresse.
Tout d’abord pour son architecture et son design, indiscutablement contemporains.Â
la sculpture « Creature from Iddefjord », réalisée par Martin Puryear, trônant sur le parvis de la bibliothèque
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façade de la bibliothèque
un siègeÂ
Permettant à l’édifice, déployé sur 7 étages, d’être constamment baigné de lumière
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et contribuant en outre, par le biais des fenêtres vitrées posées, à ménager de splendides perspectives sur les alentours.
Notamment sur le fjord d’Oslo, l’emblématique Opéra et les îles disséminées dans la baie.
vue sur la pointe de l’Opéra
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Autant de panoramas se laissant aussi embrasser du regard depuis les espaces de travail aménagés à chaque étage.
Mais l’attrait de la bibliothèque Deichman ne saurait être circonscrit à sa seule esthétique.
Cela reviendrait, en effet, à oublier l’extraordinaire lieu de savoir, dont témoignent la richesse et la diversité des ouvrages y étant hébergés (et ce dans plusieurs langues), qu’elle représente.
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Et même si elle constitue une indubitable enclave d’exception pour les lecteurs, les mélomanes seront également enchantés d’y découvrir studios aménagés, instruments laissés à disposition et nombreux albums disponibles à l’écoute.
Dotée, enfin, d’un restaurant, d’un bar , d’un cinéma et de multiples installations dédiées aux enfants, la polyvalente bibliothèque Deichman est assurément un lieu où il fait bon s’installer.
Pour quelques minutes, une heure voire plus si affinité 🙂
LAMBDA, LE NOUVEAU MUNCH MUSEUMÂ
A quelques pas de l’Opéra et de la bibliothèque Deichman, surgit la longiligne et atypique silhouette, objet de nombreux débats, du nouveau musée Munch, dont la construction est en passe d’être achevée.
 Construit selon les principes de l’architecture durable, cet écrin, de béton, acier, aluminium et verre, accueillera, sur 13 étages, l’ensemble de la collection (forte de 28000 tableaux, dessins et photographies) léguée à sa mort par Edward Munch à la ville d’Oslo;
tombe de Munch au cimetière d’Oslo
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présentera des expositions temporaires faisant entrer en résonance les Å“uvres de ce maitre norvégien avec le travail d’artistes contemporainsÂ
et célébrera de manière aussi plurielle que novatrice, comme la conception du musée, confiée au studio d’architecture Herreros, en atteste, le génie d’un homme considéré comme le précurseur du mouvement Expressionniste.
Mais Covid19 oblige, l’ouverture des lieux, espérée pour cet automne, a finalement été repoussée au printemps 2021.
D’ici là , les chefs d’Å“uvre du renommé enfant du pays restent encore partiellement visibles au sein du premier musée Munch  établi, en 1963, dans le quartier de Toyen.
Une intimiste institution culturelle, explorée il y a deux ans, dont la visite m’avait enchantée.
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L’HISTORIQUE CATHEDRALE D’OSLO & SON POIGNANT MEMORIAL DES ROSESÂ
le mémorial Iron Roses sur le parvis de la Cathédrale
Edifiée à la fin du 17 ème siècle, la cathédrale d’Oslo se distingue, en premier lieu, par les magnifiques fresques ornant son plafond, par la beauté de ses originels retable et buffet d’orgue ainsi que par les superbes vitraux, signés Emanuel Vigeland (frère de Gustav Vigeland, sculpteur à qui l’on doit le très beau parc osloïte de Vigeland ), qu’elle recèle.
Mais depuis fin septembre 2019, l’émouvant mémorial « The Iron Roses », venu investir son parvis, confère à l’édifice religieux un supplément d’âme.
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Initié par les artistes Tobbe Malm et Tone Mork Karlsrud, ce projet figurant une centaine de roses en fer forgé,
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qui rappellent les fleurs déposées là par la population au lendemain des attentats de 2011 , est, en effet, un hommage aux 77 victimes des attaques terroristes perpétrées le 22 juillet 2011, au cÅ“ur d’Oslo et sur l’ile d’Utoya, par Anders Behring Breivik.
Conçues par des forgerons du monde entier, des familles de disparus et des survivants des tueries, ces roses, uniques par leurs formes, couleurs et matériaux, ont été agencées en une très belle sculpture circulaire invitant au recueillement.
Ou quand l’Art se veut, avec brio, l’expression de la compassion manifestée à l’endroit des victimes.Â
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L’INSTRUCTIF MUSEE DE LA RESISTANCE NORVEGIENNEÂ
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3 résistants norvégiens arrêtés en décembre 1940, condamnés à mort et exécutés, en août 1941, à l’extérieur du musée.
C’est au cÅ“ur de la vaste forteresse médiévale d’Akershus, dominant le fjord d’Oslo et construite autour du château éponyme où les Nazis établirent, entre 1940 et 1945, leur quartier général, que les résistants norvégiens choisirent, en 1970, d’installer, dans un édifice à colombage, le Musée de la Résistance.
Qui à travers un aussi didactique, instructif qu’exhaustif parcours chronologique, mis en lumière par les photographies, textes, journaux, témoignages, objets, affiches, maquette, documents, installations plurielles, films et archives sonores présentés, raconte :
l’opération Weserubung , nom de code de l’invasion surprise de la Norvège (pourtant alors déclarée pays neutre), le 9 avril 1940, par les troupes du III eme Reich;
bombardement sur Kristiansund, 28 & 29 avril 1940
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la période de l’Occupation : rimant pour la population avec quotidien fait d’extrêmes privations, réquisitions, violences, censure, persécutions, absence de libertés et résistance (s); concrétisant, pour certains, l’ère de la Collaboration et alimentant, par ailleurs, la crainte des autorités allemandes de voir un débarquement Allié (lequel aura lieu sur les cotes normandes) avoir lieu sur le territoire
panique à Oslo, 10/4/40
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et la Libération de la Norvège, consécutive à la capitulation des Nazis le 8 mai 1945, suivie du retour d’exil du roi Haakon VII.
portrait du roi Haakon VII
le roi Haakon VII ouvre la session parlEmentaire en décembre 1945
Tout en s’attardant, volontiers, sur l’histoire des Résistances, tant civile que militaire, que les Norvégiens (femmes, hommes, jeunes et personnes plus âgées) opposèrent durant 5 ans aux armées hitlériennes.
Car, très vite, face à la trahison de l’autoproclamé premier ministre norvégien Vidkun Quisling, chef du parti d’extrême-droite Nasjonal Samling qui met en place un gouvernement de collaboration dont il  prend la tête, et à la mainmise du pays (qu’il s’agisse de la Wehrmacht ou de la Gestapo) dorénavant placé sous le contrôle du Commissaire du Reich Josef Terboven, gouverneur de la Norvège occupée, la Résistance s’organise.
A l’extérieur du pays, et en l’occurrence depuis Londres, tout d’abord.
Où le roi Haakon VII, s’y étant réfugié en juin 1940 avec les membres de son gouvernement, lance des appels à résister sur les ondes de la BBC , finance la résistance intérieure et aide les Alliés à élaborer raids et autres opérations militaires qui contribueront, in fine, à la défaite définitive au III ème Reich
A l’intérieur de la Norvège ensuite.
Grâce, entre autre, à la naissance de groupes de résistants, tels le R-Group et l’incontournable Milorg qui comptera jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’hommes, dont le champ d’action s’étend de l’établissement de faux papiers d’identité à la cache d’armes, en passant par l’obtention de renseignements capitaux, la fabrication d’armes et diverses attaques menées contre l’occupant;Â
Aux nombreux actes de sabotage notamment menés, à partir de 1942, par la résistance communiste
radio clandestine
groupe de résistants norvégiens, condamnés à dix ans d’emprisonnement en Allemagne
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hutte où se cachaient les membres de Milorg
et à la multiplication d’actes de résistance par les civils.
Qu’il s’agisse de manifester, de créer des filières d’évasion pour rejoindre, depuis la Norvège, l’ Angleterre ou la Suède, d’imprimer et distribuer tracts outre journaux illégaux, de mettre en place un marché noir afin de faire face aux pénuries et rationnements du quotidien, d’installer des postes émetteurs, d’écouter la BBC; de constituer une fronde, comme le firent les enseignants, en guise de réponse aux tentatives de nazification de l’école opérées par les Nazis ou de s’insurger, à l’instar de l’Eglise, contre l’idéologie nazie.
Le tout cependant à leurs risques et périls.
Car traqués par les hommes de la Gestapo, les résistants, fussent ils civils ou militaires, risquent, en cas d’arrestation, torture, emprisonnement (notamment à la prison de Mollergaten 19 d’Oslo), déportation en camps de concentration (qu’ils soient situés en Norvège, celui de Grini aménagé dans les environs d’Oslo étant à ce titre l’un des plus connus, dans d’autres pays occupés par les Nazis ou en Allemagne même) ou exécution immédiate.Â
La mort est aussi le sort malheureusement réservé aux 2100 membres de la communauté juive norvégienne qui, comme dans tous les autres territoires occupés par les Nazis, se trouve également pourchassée.
Ainsi, sur les près de 800 personnes juives (dont 74 enfants) déportées, depuis la Norvège, vers le camp d’extermination d’ Auschwitz-Birkenau, seules 34 survivront.
camp de concentration de Grini
liste de prisonniers sortis clandestinement de Grini
photo d’un enfant dans un ghetto juif de Pologne
Un sombre pan de l’Occupation que le Musée de la Résistance a également tenu à mettre en lumière.
LE SPECTACULAIRE CHATEAU DE LA ROSE
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C’est dans la même logique mémorielle, que celle ayant présidé à la fondation du Musée de la Résistance Norvégienne, que s’inscrit, en cette année 2020 où la Norvège commémore le 80 eme anniversaire de son invasion par les troupes nazies et le 75 eme anniversaire de sa libération, la création puis l’ouverture, à la mi-juin, du spectaculaire Château de la Rose.
the Unborn Star
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Nichée au sommet du quartier résidentiel d’Holmekollen, depuis lequel Oslo se dévoile de la plus belle manière,Â
cette installation artistique d’envergure,
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dont le nom est un clin d’Å“il au mouvement de résistance allemand de la Rose Blanche ( fondé, en 1942, par des étudiants munichois parmi lesquels figurait Sophie Scholl), fait véritablement Å“uvre de mémoire.
En s’attachant à évoquer les 5 années, symbolisés par les 5 grandes sculptures érigées sur place, de l’Occupation nazie dans le pays .
Et en soulignant en creux, dans le même temps, l’importance des principes démocratiques, du refus du racisme, de la défense des droits de l’homme et de l’attachement aux Libertés.
 Soit autant de valeurs, foulées au pied par les armées hitlériennes entre 1940 et 1945, qui constituent les pierres angulaires sur lesquelles repose la construction de l’Etat norvégien.
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Ainsi, à travers 95 monumentaux tableaux et plusieurs sculptures géométriques (rendant notamment hommage à toutes les forces de la Résistance norvégienne: depuis la marine marchande et les forces aériennes, en passant par les groupes de résistants militaires, la résistance civile, le roi Haakon VII jusqu’ à la presse clandestine), imaginés par Vebjorn et Eimund Sand (deux renommés artistes-frères),
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le parcours en plein air du Château de la Rose se place à hauteur d’homme pour, entre autre, nous :
raconter la bataille de Narvik d’avril 1940; évoquer le destin et les combats menés durant la seconde guerre mondiale par plusieurs résistants norvégiens (héros reconnus ou au contraire demeurés anonymes)
norvégiens tentant de s’enfuir pour se réfugier en Suède
soldat inconnu
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Astrid Linerud, plus jeune (9 ans) passeuse durant l’Occupation
Jens Christian Hauge, chef de l’organisation résistante MILORG
général Carl Gustav Fleischer, vainqueur de la bataille de Narvik,
accompagna le roi en exil à Londres en 1940
rappeler la Collaboration des uns;
Gunnvor, jeune femme ayant eu une liaison, qu’elle fut obligée après-guerre de cacher, avec son soldat allemand
The Gang Cloister
Kinderheim Stalheim
Reinhard Heydrich, le Boucher de Prague
Josef Terboven, gouverneur nazi de la Norvège occupée, bronzant à Skeikampen en avril 1942
montrer les difficultés de la vie quotidienne sous l’Occupation;
Oslo occupée par les Nazis
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se pencher sur les souffrances endurées par les prisonniers de guerre,
parler de l’Epuration et notamment des séances de tonte infligées, après-guerre, à des femmes coupables d’avoir collaboré « à l’horizontale »
sans oublier de mentionner les mesures antisémites prises, en Europe, par le III ème Reich, l’érection des nombreux camps de concentration et d’extermination ainsi que la Shoah à laquelle les Juifs de Norvège ne purent échapper.Â
The Figure, Dance of Pain Series, Pina Bausch
Ellinor Miriam Meiran, petite fille juive de 5 ans déportée de Norvège et assassinée à AuschwitzÂ
Appelant à rester vigilant et à combattre toutes les idéologies, nauséabondes, susceptibles de menacer la Démocratie, le Château de la Rose éveille, sans conteste, les consciences.
Une expérience, initialement visible jusqu’à l’été 2021 mais à présent prolongée jusqu’à fin 2022, que je vous recommande vivement si vous faites prochainement escale dans la capitale norvégienne.
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